Que faire en cas de viol ?
Les conseils d'Emmanuelle Piet,
présidente du Collectif Féministe Contre le Viol
En cas de viol, il est essentiel d'en parler le plus tôt possible. En France, porter plainte au commissariat de police ou à la gendarmerie reste la première étape à franchir pour les victimes. Ensuite, un examen doit être réalisé par un médecin légiste, idéalement dans les cinq jours suivant le subisse sexuel enduré. Et si la victime ne souhaite pas porter plainte ? Un passage aux urgences s'impose tout de même.
Peur de ne pas être crues, ou pire, d'être jugées, les victimes d'agression sexuelle ou de viol s'accordent à dire que le plus dur est d'en parler. Pourtant, cette étape est essentielle pour aller de l'avant. Un véritable parcours les attend et il est primordial d'être accompagné.
"Avec le mouvement Metoo, j’ai réfléchi à une situation que j’avais vécue et en la reconsidérant, je me suis rendue compte que c’était un viol. J’avais beaucoup bu et du coup je n’étais pas consentante...." De nombreuses victimes de viol ne se considèrent pas comme telle, notamment quand elles avaient bu au moment des faits. Pourtant, la loi est très clair : s'il n'y a pas consentement, il y a viol.
1. Parler de ce qu'il s'est passé
"Quand on est victime de ce genre d'actes, tu as envie de te mettre en boule, de te laver des centaines de fois et de fermer la porte à clé. Mais c’est tout ce qu’il ne faut pas faire", assure Emmanuelle Piet, présidente du Collectif Féministe Contre le Viol.
La première étape en cas de viol ou d'agression sexuelle est en effet d'en parler. L'idéal est d'avoir une personne de confiance à qui se confier, une copine, une mère, un frère ou une sœur, pour trouver de l'aide et se sentir soutenu. De nombreuses victimes se tournent également vers leur médecin de famille, une oreille attentive et soumise au secret médical. Il est enfin possible d'appeler Violences Femmes Info au 39 19 ou le numéro d'aide aux victimes au 116 006.
Il est par ailleurs recommandé d'éviter de prendre une douche avant de se faire examiner par un médecin légiste (étape trois) ou de jeter les vêtements que l'on portait au moment de l'agression.
2. Porter plainte
Il n'y a pas de petit abus et porter plainte est essentiel pour que son agresseur réponde de ce qu'il a fait. En France, les victimes ont vingt ans pour porter plainte, trente si elles étaient mineures au moment des faits. Il est cependant conseillé de se rendre au commissariat ou à la gendarmerie le plus tôt possible pour pouvoir être examiné rapidement par un médecin légiste et faire constater l'agression.
Malheureusement, en France, porter plainte est une étape obligée pour obtenir un certificat médical d'un médecin légiste. Ce n'est pas le cas en Belgique par exemple (voir plus bas).
3. Se rendre aux urgences médico-judiciaire
L'étape suivante est de se rendre aux urgences médico-judiciaire, "en espérant être bien reçu", souffle Emmanuelle Piet. Un médecin légiste va alors examiner les victimes pour constater les éventuelles plaies et lésions et notamment rechercher des traces éventuelles de sperme. "Pour être optimal, il faudrait que cet examen soit réalisé dans les 48 heures après l'agression et au maximum cinq jours après", souligne le professeur Bernard Jacquetin, gynécologue obstétricien.
Et si l'on ne veut pas porter plainte...
Il n'est pas toujours possible pour les victimes de porter plainte. Dans ce cas, il est tout de même recommandé d'aller aux urgences au plus vite.
"Il existe aujourd'hui un traitement post-exposition au VIH qui limite les risques de contamination, mais qui doit être pris au plus tard 48 heures après l'exposition au risque", explique Emmanuelle Piet.
Le médecin pourra également vérifier qu'il n'y ai pas de plaie ou de lésion qui mérite d'être soignée. Dans ce cas, l'idéal est de demander un certificat médical constatant ces plaies pour éventuellement porter plainte au moment où la victime se sentira prête.
Aux urgences, il n'y a aucune obligation à dire que l'on a été violé, il suffit de dire : "J'ai eu une relation sexuelle à risque". Cependant, dans ce cas, le médecin ne procèdera pas forcément à un examen gynécologique et risque de passer à côté d'éventuelles blessures.
Dans les semaines qui suivent, faire un test de grossesse pour les femmes et un test de dépistage aux M.S.T. est également nécessaire.
4. S'entourer de spécialistes
Consulter un spécialiste n'est pas une étape obligée dans un parcours de reconstruction. Seulement, il est important de pouvoir parler de son traumatisme avec des personnes qualifiées, qu'il s'agisse d'un psychiatre ou d'une association par exemple.
Si l'on a porté plainte, il est également recommandé de s'entourer d'un avocat.
Et en Belgique...
Emmanuelle Piet, présidente du Collectif Féministe Contre le Viol, aimerait qu'un système similaire à celui mis en place en Belgique puisse exister en France. "En Belgique, il existe des centres de victimes de viol où les victimes sont bien traitées, prises en charge, examinées, soignées et écoutées par des policiers spécialisés, volontaires et formés. Et là-bas, si tu ne veux pas porter plainte, ton dépôt est gardé sans limite de temps. On se bat pour avoir cela en France", assure la militante.
Sources :
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Interview de Emmanuelle Piet, présidente du Collectif Féministe Contre le Viol, août 2020
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"Viol commis sur une personne majeure", Service Public France, mis à jour en décembre 2018
Qu'est ce qu'un viol ?
"Le viol est une atteinte sexuelle avec pénétration commise sans le consentement de la victime."
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Le viol est un acte de pénétration sexuelle commis sur une victime avec violence, contrainte, menace ou surprise.
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Tout acte de pénétration sexuelle est visé : vaginale, anale ou buccale, notamment par le sexe de l'auteur. Il peut aussi s'agir de pénétrations digitales (avec le doigt) ou au moyen d'un objet.
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S'il n'y a pas eu pénétration, il s'agit d'un délit d'agression sexuelle.
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Il n'est pas nécessaire qu'il y ait des violences physiques pour qualifier un acte de viol.
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Le viol est un crime, même s'il est commis par l'époux de la victime, par son concubin ou son partenaire de Pacs.
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La tentative de viol est punie des même peines que le viol. Il y a tentative de viol si l'auteur a essayé de violer sa victime, mais n'y est pas parvenu à cause d'un élément indépendant de sa volonté.